Le cinéma forain, le tabou du cinéma américain par Xavier Jeudon, le jeudi 08 décembre 2016





Conférence par Xavier Jeudon, chercheur en Histoire du cinéma, "Le cinéma forain, le tabou du cinéma américain" :

Tandis que le cinéma forain tient une place prépondérante dans les premières années du développement de l'industrie cinématographique américaine, sa figure est d'une extrême rareté sur les écrans américains. Associé à des pulsions macabres, à la culpabilité et au mystère des origines, le cinéma forain serait-il le seul vrai tabou du cinéma américain ?

Ne pouvant étudier la figure du cinéma forain dans les films américains, nous étudierons sa trace. Le cinéma forain devrait être présent dans les représentations de fêtes foraines, autour des cirques et dans les foires. C'est donc dans les films circassiens que le manque sera le plus visible, que la trace sera la plus parlante. Après avoir étudié l'héritage historique américain et européen des films circassiens américains, la question de l'absence du cinéma forain reste entière. Pourtant l'approche historique nous introduit à la question des origines. C'est donc vers l'interprétation psychanalytique de l'absence, le tabou que nous nous tournons. Le cinéma américain, ou plus exactement ceux qui le composent refuseraient se confronter à l'origine foraine du cinéma américain. Le cinéma ayant entraîné la chute du cirque, grande attraction populaire de la fin du XIXème siècle, la culpabilité plane sur les héritiers d'Edison et Porter. Telle la horde primitive freudienne, le cinéma américain a causé la mort de celui qui l'a accueilli à sa naissance. A partir de cette culpabilité, et variant selon les réalisateurs et les périodes, les films circassiens ne vont cesser de laisser transparaître les pulsions et les conflits psychiques qui animent le cinéma américain. Refoulement, dénégation, formation réactionnelle, activisme, régression, intellectualisation, projection et autres mécanismes de défenses vont être à l’œuvre pour éviter aux cinéastes de souffrir de la culpabilité, des pulsions ou des conflits psychiques qu'ils ont hérité de l'époque ou le cinéma est sorti de la fête foraine


Cette soirée est la cinquième et dernière du Cycle "Les parcours clandestins du cinéma" de septembre à décembre 2016 :

Depuis 2011, dans le cadre du projet Makhnovtchina, Echelle Inconnue, traverse la Normandie et l’Est de l’Europe et réalise de courts films documentaires avec des personnes vivant ou travaillant dans la ville mobile et foraine. Aujourd'hui, Makhnovtchina s'enrichit d'un cine-truck ou camion-cinéma, le MKN-VAN. Lanterne magique, salle de projection, studio d'enregistrement et atelier mobile, celui-ci lui permet de diffuser les films réalisés avec ces personnes sur les lieux-mêmes et a pour objectif de rapprocher des situations de mobilité les unes des autres.

Le cinéma au centre donc, et une réflexion portée tant sur la réalisation que sur la diffusion des films.

Ainsi, outre nos références telles que le ciné-train de Medvedkine, le manifeste de Vertov, le cinéma forain du début du XXe siècle, ou le cinéma direct des années soixante, nous souhaitons ouvrir la boite à outils du DSEA sur les histoires clandestines du cinéma, et les partager avec vous pendant quatre mois.

Avec quatre interventions de septembre à décembre 2016, ces histoires traverseront la France (et plus précisément la ville de Rouen), l’Espagne et l’Amérique, afin d’interroger différentes périodes historiques depuis l’invention du cinématographe. Quatre sessions donc, qui ré-écrivent l’Histoire du cinéma afin de mettre en lumière ses voies clandestines, foraines, anarchistes (…). Lors de ce cycle, le Doctorat Sauvage Numérique vous propose également un TP avec une formation au logiciel libre Blender pour le montage vidéo, par des membres de Synaps Collectif Audiovisuel.